Kispasse

Friday, March 31, 2006

Vivement mardi

Mon chiraquisme est déçu. D'habitude, notre président-girouette suit le sens du vent et des mouvements. Mais cette fois, il n'est plus dans le mouv'. Quand il a parlé d'écologie au sommet de la Terre de Johannesburg, quand il a défendu d'autres moyens de taxation internationale ou quand il s'est élevé contre la guerre en Irak devant l'Onu, j'ai été fier d'être Français et j'en ai presque oublié que c'est le même Chirac qui avait repris les essais nucléaires en 1995 ou que l'aide au développement versé par la France était très très loin des 0,7% du PIB jadis promis. Bref, j'étais presque devenu chiraquien et j'admirais cette faculté unique à retourner sa veste, grande qualité d'un maître politique.
Mais Chirac vieillit, et il a perdu de sa superbe. Je l'imaginais annoncer le retrait du CPE et nommer Sarkozy Premier ministre, histoire que lui aussi se brûle au pouvoir. Tous les indicateurs auraient dû le pousser à ne pas promulguer la loi : le peuple dans la rue, les blocages, les débordements, les sondages... Et pourtant, cet homme sans conviction n'a pas retiré le CPE. C'est reparti pour une nouvelle démonstration de force dans la rue mardi. J'y serai et je pleurerai mon chiraquisme déçu.

Le pouvoir des marques

Elles sont partout. Sur les affiches géantes qui envahissent les villes, sur les maillots de foot des brèles du PSG, entre le JT et le blockbuster, sur la plupart des sites Internet... Vade retro Google Adsense, tu ne m'auras pas! Les marques sont partout, et leur pouvoir est plus pernicieux qu'il n'y paraît.
Après la thèse, l'exemple à la con qui illustre mon propos. Je suis un jeune journaliste plein d'entrain et prêt à rentrer sur le marché du travail. Or un certain Armand qui est venu sur mon blog par hasard vient de lâcher en commentaire : "Y'a encore du boulot pour entrer à Libé ou L'Equipe si vous voulez mon avis". De quoi me faire angoisser à moins de deux mois de mon entrée sur le marché du travail...
Sauf que, mes fidèles lecteurs le savent, j'ai déjà travaillé pour Libé en février. J'ai d'ailleurs retranscrit ma dizaine d'articles publiés dans ce journal sur mon blog. J'en suis donc capable, n'en déplaise à Armand. De même, je passe bientôt le concours pour tenter d'intégrer L'Equipe en CDD. Je ne sais pas si cela va marcher, mais le fait même de le tenter signifie que l'on est capable de rentrer dans la rédaction (les écoles de journalisme ne présentent que les candidats qu'elles jugent aptes à décrocher la timbale). Donc Armand s'est trompé.
Quel est le lien avec les marques, me direz-vous? C'est simple : si vous lisez mes écrits dans Libé ou L'Equipe, vous ferez fort attention à ce qui est marqué, alors que s'ils ne sont que sur mon blog, vous les regarderez en diagonale. Certains ne regardent que les photos et ils seront pourtant les premiers à s'intéresser à ce que j'écris dans Libé. Alors? Ce que je dis prend-il plus de valeur parce que cela porte l'estampille Libération?

Wednesday, March 29, 2006

Lutte finale

Je sens que l'on approche du dénouement. Villepin va craquer, on aura droit à un happy end. Le CPE va être rangé au rayon des reliques, des réformes avortées comme le CIP avant lui. No passaran, on ne précarise pas les jeunes impunément.


La question n'est plus de savoir si Villepin va retirer le CPE, mais quand et surtout comment. La théorie à la mode, c'est le recours au Conseil constitutionnel qui retoquerait la loi. Ce n'est pas souhaitable pour deux raisons. Le PS avait déjà saisi le conseil des "sages" l'été dernier pour le CNE. Ces derniers n'avaient rien trouvé d'anticonstitutionnel dans cette loi, pourquoi en serait-il autrement du CPE alors que les dispositions sont les mêmes (seules différences : ça concerne toutes les entreprises, mais seulement les moins de 26 ans)? De plus, la procédure utilisée pour adopter la loi sur l'égalité des chances, à savoir le 49.3, pour contestable qu'elle soit, est constitutionnelle. C'est même un pléonasme de le dire, puisque le 49.3 fait référence à l'article 49.3 de la Constitution. Enfin, si les sages déclaraient que le CPE est anticonstitutionnel, cela montrerait une fois de plus qu'ils sont complètement à la botte du pouvoir. Dans ces conditions, ils ne servent à rien.



On reproche souvent à la gauche de ne pas proposer d'alternatives au CPE. Sauf que... La solution au chômage n'est pas la précarité. On n'a jamais eu autant d'emplois créés que sous Jospin. Certes, il y avait la croissance, mais le passage aux 35 heures a enrichi cette croissance en emplois. Ce surplus de croissance aurait pu profiter à ceux qui sont déjà dans le système, le partage du temps de travail a permis qu'il bénéficie aussi à ceux qui étaient en dehors. La gauche avait aussi créé les emplois-jeunes, des emplois utiles pour la collectivité. Certes, ils n'étaient que pour 5 ans, mais au moins, la situation était claire dès le départ. Merci qui ? Merci Martine. A propos, qui envoie-t-on sur les plateaux télé (Chabot, Ockrent) quand il faut parler de questions sérieuses, comme le chômage, la politique économique, le droit du travail ? Non, ce n'est pas Ségolène, c'est Martine. Du haut de son beffroi, elle a pu admirer les départs des manifs lilloises.


Et mon petit préféré pour la fin...

Monday, March 27, 2006

Adopteur de consciences

"Un soir, il faisait -6°. Avec mon épouse, on s’est dit : tant pis si on est dans l’illégalité, mais on prend le plus jeune chez nous." Aussitôt dit, aussitôt fait. Joël et Geneviève Loeuilleux accueillent un Afghan de 15 ans dans leur maison de Coulogne, près de Calais. L’adolescent raconte son histoire pendant le dîner. Son père a été tué par les Talibans. Sa mère a explosé sur un marché. Il a été torturé à 11 ans. Il a confié son petit frère à une famille et s’est mis en route. Destination, l’Angleterre promise.
Un voyage de trois mois en bus, à pied, ou caché dans les toilettes des trains. Il échoue à Calais. Les 34 derniers kilomètres, ceux de la traversée de la Manche, sont les plus difficiles. Il dort dans la rue, puisque le centre de Sangatte a été fermé par Nicolas Sarkozy. Jusqu’à ce que Joël accepte de l’héberger. Il demande à ses hôtes de devenir ses parents. Ils acceptent sans hésiter.

L’adoption, une suite logique à des années d’engagement. Petit, Joël avait été marqué par un vieil Algérien : "Il vivait dans la cave d’un policier et l’aidait à aménager son jardin. Un jour, il m’a dit que le jardin était fini et que le policier allait le mettre en prison." Une autre fois : il voit, en sortant du cinéma, une bande tenter de jeter un Arabe dans le canal.
Adulte, Joël devient éducateur. Il met du temps à s’intéresser à la Ligue des droits de l’homme : "Je me sentais trop prolétaire pour aller dans cette vieille institution de notables." Un jour, un ami directeur de collège lui parle de deux élèves, franco-turcs, renvoyés à Istanbul avec leur père. Joël adhère à la Ligue et devient le président de la section de Calais en 1991. Il aide les réfugiés du Tamoul, les Kosovars, les Kurdes ou les Afghans. Des rencontres très fortes : "J’ai vu une jeune fille qui avait été violée plusieurs fois par des policiers. Elle avait dû abandonner son bébé en Inde et rêvait de gagner l’Angleterre."

Joël interpelle le sous-préfet, passe ses nuits dans les jardins publics à réconforter les réfugiés, se rend à Genève pour exposer la situation calaisienne au Haut commissariat des réfugiés de l’Onu. "On n’a rien obtenu. La France fait partie du Conseil de sécurité et elle ne reconnaîtra jamais qu’il y a un camp de réfugiés sur son territoire." Joël demande juste le respect de l’article 13 de la Déclaration universelle des droits de l’homme : "Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien."
Joël, Geneviève et le jeune Afghan se sont adoptés mutuellement : "Il ne parlait pas un mot de Français en arrivant. Un an plus tard, il réussissait son brevet." Il a demandé sa naturalisation : "Il veut changer d’état civil pour mieux s’intégrer, car il pense que son nom de famille sera un handicap."
Joël entame les démarches pour adopter son jeune frère : "On a eu le visa au bout de trois ans." En mars, les deux frères ont enfin été réunis. A 60 ans, l’âge où l’on pouponne ses petits-enfants, Joël et Geneviève retrouvent les joies d’avoir deux ados à la maison.

Sunday, March 26, 2006

Emile et images

Petits délires entre amis. On est en pleine réalisation de notre mag de fin d'études qui reprend la maquette du Point, s'intitule Le Poing et s'interroge sur ce qui est efficace pour changer le monde aujourd'hui. Voilà quelques une fictives réalisées par Emile J., futur chef du service politique de Libération à moins qu'il ne soit que député PS (motion Rénover maintenant) de Créteil.

Friday, March 24, 2006

Salut l'autiste !

Quand la vie est plus excitante qu'un scénario de télé-réalité...
Par Thierry Bretagne (mon journaliste préféré) dans Basket News.

Au siècle dernier, dans les campagnes, on les appelait demeurés ou simplets. Jason, 17 ans, joli sourire diaphane, butant sur les mots, et les orbites comme rencognés sous un front un peu proéminent. Héros de l'Amérique depuis le 16 février dernier. Une histoire à la Bataille et Fontaine de deuxième partie de programme sur TF1. Jason McElwain, autiste, avait été promu "manager" de son équipe de basket de lycée, Greece Athena, à Rochester, état de New York. Le blason de l'équipe est un hoplite de profil en ombre chinoise. Perfection antique...

Manager? Terme ronflant. En fait, il passait les serviettes et portait les ballons, en permanence avec eux, jamais sur le parquet. Cinq pieds, six pouces: officiellement trop petit pour "faire" l'équipe. Mascotte. On appellerait ça leurs bonnes œuvres si on n'avait crainte de choquer.
Mais, à Rochester, ce jour-là, c'est le dernier match à domicile, la salle est pleine, les cheerleaders excitées, on transpire au seul spectacle de ces tribunes bondées. Jason, maillot 52 sur tee-shirt, est sur la feuille de match. Il n'est jamais entré.
En face, Spencerport, l'adversaire: largué. Le match tire à sa fin. Jim Johnson, le coach, aimable moustachu, lance Jason, qui a son fan club dans les travées. Ils brandissent des pancartes, une seule lettre. J. Quatre minutes à jouer. Deux shoots: un air-ball et un lay-up manqué. Et l'improbable survient: Jason, de l'aile droite, une fois, deux fois, puis à l'opposé, se met à allumer. Tressautement du cadreur amateur qui immortalise l'exploit. En une poignée de secondes, on est passé de Vidéo Gag au Top Ten de NBA Action. Le lieu même change de nature. La foule devient folle, qui transforme le gymnase gentilletet banal en école de samba.

Dans une ambiance de favela un soir de match de la Seleçao, Jason, véritable machine à shooter, allume toujours, six "threepointers" en moins de quatre minutes, 20 points venus d'un autre monde, celui du paranormal. A la fin, ils envahissent le plancher, dans la fièvre d'une manif étudiante contre le CPE, mais le contrat de Jason se termine là, hissé à la force des bras, bandeau sur l'œil, fétu bienheureux porté par la houle, fêté comme dieu du stade. "J'étais plus chaud qu'un flingue", dit le Ravi, proie et otage des actualités télévisées. Les grandes chaînes s'en emparent, merveille de la télé-réalité. Il rappe: "The winner goes home all happy! The loser goes home and says/ Mommy we lost the game wah wah wah." Sa mère, Debbie, se tord les doigts: "Pour la première fois de sa vie, Jason a réussi et il est fier de lui." Elle dit encore que pour elle, l'autisme c'était le Mur de Berlin et que son petit mec vient de le faire exploser.
Dans les jours qui suivent, la famille est assaillie, pourchassée, invitée, honorée, adulée. Vingt-cinq propositions de synopsis cinématographiques, de Disney à Warner Bros en passant par des documentaristes indépendants. Le cinéma américain adore les génies alternatifs, les emmurés psychiques qui deviennent des prodiges, les innocents les mains pleines. Forrest Gump, attardé et sprinter; Raymond Babbitt (Dustin Hoffman) le savant autistique de Rain Man (1989); John Ford Nash Junior (Russell Crowe dans Un homme d'exception de Ron Howard 2002) mathématicien de génie au MIT, inventeur d'une théorie économique sur les jeux et totalement schizophrène… Jason fait la tournée des plateaux. "Good Morning America", le talk matinal d'ABC, et puis c'est l'apothéose.

George Bush fait atterrir son Air Force One sur l'aéroport de Rochester. Il le prend par l'épaule, sous le bras, lui tape dans le dos. "Je peux t'appeler J-Mac? Appelle-moi George Debeliou!" "Je suis fier et honoré", dit le môme. "C'est moi! Pour les trois-points, il va falloir que tu me donnes des leçons", répond le président des Etats-Unis d'Amérique. Les micros se tendent. L'homme qui s'était étranglé avec un bretzel il y a quelques années est submergé par l'émotion. "Je l'ai vu à la télévision. J'ai pleuré." Salut l'autiste!

Thursday, March 23, 2006

Pas de pitié pour les croissants

Les politiques serinent que la croissance du PIB est indispensable. Les décroissants refusent ce mode de pensée et adaptent leur vie à leurs convictions écologiques.
Ils refusent le consumérisme et le confort moderne. Ils rejettent la voiture, les hypermarchés et le suremballage. Ils achètent bio, éthique et local. Ils cultivent souvent leur jardin. Sans engrais chimique. Ils organisent des marches pour la décroissance. La première s’est déroulée en juin dernier. 500 personnes sont parties de Lyon pour rejoindre Magny-Cours et protester contre le Grand Prix de Formule 1. Du pétrole consommé “inutilement”, une compétition placée sous le signe de l’argent, des vies mises en danger au nom du spectacle... Pas très décroissant, tout ça.

La première marche pour la décroissance (photo de Cécile Dubart)
Ils lisent La Décroissance, le journal de la joie de vivre : "Aujourd'hui, la consommation n'est plus un moyen, mais une finalité. La croissance sacralisée est devenue une nouvelle religion. Nous voulons remettre les valeurs à leur juste place. Notre journal n'est pas une nouvelle idéologie, mais un contrepied", explique son fondateur Vincent Cheynet. Un "must" pour tous les décroissants, tout comme la revue Silence. Leur credo : «La terre n'est pas un héritage de nos parents, elle est un emprunt que nous faisons à nos enfants.» Selon les "décroissants" ou adeptes de la simplicité volontaire, en voulant toujours plus, bien que les ressources de la Terre soient limitées, on fonce droit dans le mur.

Jean Aubin prône la décroissance. Ancien maraîcher biologique, ce Breton est devenu professeur de maths : “Je forme de futurs ingénieurs, mais je me trouve plus utile en diffusant mes idées." Il a écrit un petit livre vert (Croissance : l’impossible nécessaire) qui offre quelques pistes de réflexion sur l’alimentation, le transport, le nucléaire... “Le mode de vie des occidentaux n’est pas généralisable et n’est pas durable. Il nous faudrait plus de trois planètes Terre si tous les humains vivaient comme les Français.” L’idée : se contenter du minimum vital. Un luxe de riche ? “La décroissance ne peut viser que les plus riches et cela va de pair avec une baisse des inégalités. Pour les pays du Tiers-Monde, il s’agit surtout de ne pas s’engouffrer dans la voie bouchée du développement à l’occidentale. Mais on n’oublie pas que 20% de l’humanité consomment 80% des richesses.” Irréaliste ? “On sait bien qu’on ne va pas imposer la décroissance demain et qu’il y aura une période de transition qui ressemblera au développement durable.” Un grand sujet de débat chez les décroissants. Certains voient dans ces pratiques écologiques une "écotartufferie".
Jean Aubin continue de cultiver son jardin, il va travailler en car, il part en train pour les vacances, il a installé dans sa maison un chauffe-eau solaire et une pompe à chaleur : “Ce n’est pas une astreinte pénible. Je l’ai fait par conviction, mais j’y ai trouvé du plaisir.” Jamais à court d’idées, il compte désormais construire des toilettes sèches, c'est-à-dire un système sans chasse d'eau : tout est récupéré dans un seau et peut être réutilisé comme engrais naturel. La simplicité volontaire est un cheminement sans fin. Chaque acte de la vie quotidienne est concerné.
Les Nordistes Jean-Pierre et Chantal Cornee ont fait un choix de vie semblable. Ce couple d’agriculteurs bio vit essentiellement de ses productions. “On a une petite ferme autonome, avec quelques bovins, deux ânes, des poules et des lapins. Pour le reste, on vend nos produits sur deux marchés. On essaie de vivre avec ce que la nature nous donne.” Ils ont fait ce choix éthique dans les années 80 : “Au départ, on voyait l’agriculture bio comme une régression. En discutant avec des maraîchers qui avaient fait ce choix, on s’est rendu compte qu’ils étaient en fait à la pointe du progrès.”
Les décroissants ne vivent pas tous à la campagne. Cécile Dubart, une jeune Lilloise, se revendique aussi de ce mouvement. Elle travaille à temps partiel et s’en satisfait. Sa voiture a rendu l’âme en 2002, mais elle n’en fait pas une tragédie : “C’est le symbole du gâchis et de l’antivie.” Elle roule désormais à vélo et milite pour l’ADAV (association pour le droit au vélo qui organise la vélorution). Elle va le moins souvent possible au supermarché et évite les achats compulsifs entretenus par la publicité. Elle fait partie du collectif "Sortir du nucléaire", mais “refuse de militer pour brasser du vent”. Son but : être plus autonome et aller vivre à la campagne. On y revient.
Cécile se plaint de la désinformation, notamment sur les nanotechnologies : “On nous en vante les aspects positifs sur le plan médical. Et on oublie de nous dire que c’est l’armée qui investit beaucoup d’argent dans ces recherches-là pour développer de nouvelles armes.” Seule concession de Cécile : “Je vais souvent au cinéma alors que c’est une industrie incroyable.” Les décroissants sont ainsi, naviguant en permanence entre leurs convictions idéologiques et les conséquences pratiques sur leur mode de vie. Ces agitateurs de conscience sont persuadés que leurs idées sont appelées à se développer : “Soit on organise la décroissance, soit ce sont les circonstances qui nous y pousseront.”

La Terre pressée comme une orange ? (un dessin de Jean Aubin)

De Gandhi à Yves Cochet
Ce mouvement n’est pas aussi nouveau qu’il en a l’air. Le modèle à suivre n’est autre que Gandhi. Le Mahatma a posé les préceptes de vie de la simplicité volontaire. La théorie économique a été élaborée par Nicholas Georgescu-Roegen. Le rapport du Club de Rome, Halte à la croissance, en 1972, a repris ces idées. Il annonce un futur catastrophique pour l'humanité si elle continue à ne pas se préoccuper des conséquences de ses activités sur l'environnement. Mais même dans le scénario le plus défavorable, le rapport ne prévoit pas d'épuisement de ressources avant 2010, autrement dit demain.
Dans les années 70 en France, le journal La Gueule ouverte annonçait la fin du monde. Les Casseurs de pub ont récemment remis ces idées au goût du jour. D’individuel, le mouvement devient collectif et il commence à trouver un écho politique, notamment par l’intermédiaire du député vert Yves Cochet, fervent partisan de la décroissance. Des forums ouvrent sur Internet pour partager ses expériences et se refiler des tuyaux.

Derniers déboires avec la police

Ca faisait (trop) longtemps que je n'avais pas parlé de mes embrouilles avec la maréchaussée. Petit récapitulatif en deux parties.
Il y a 3 semaines, je sors de boîte à 6h du mat'. Manque de bol, c'était dans le quartier de Lille où travaille la plus vieille profession du monde. Du coup, les flics rodent, me traquent, m'arrêtent, me contrôlent (énumération destinée à donner l'impression d'un Etat policier, ou comment les figures de style peuvent tenter de tromper le lecteur). Bref, test d'alcoolémie négatif. En revanche, je n'avais pas mon permis sur moi. Comme ils voulaient visiblement me coincer, ils m'ont mis à l'amende pour cela (11 euros). Alors qu'un flic a pu appeler un PC central qui lui a confirmer que j'avais bien mon permis. Après m'être platement excusé et voyant l'absence de résultats, je leur fait la remarque : "C'est bien, votre ministre va être content de vous." "Que dites-vous ?", me répond-elle, me tendant une perche pour un bel outrage à agent. "Je dis qu'il y a cinq ans, vous ne m'auriez pas verbalisé pour ça." Elle prétend que si, on me tend ma contravention : "Enfin, si ça peut permettre de rembourser les déficits de l'Etat !" On se quitte avec un hypocrite "au revoir".
Hier, nouvel épisode de cette saga à rebondissements. Je rentre chez moi à vélo, comme d'hab. En grillant les feux rouges quand cela ne présente strictement aucun danger (très bonne visibilité...), comme d'hab. En effet, il n'y a rien de plus désagréable que de se prendre les pots d'échappement dans la gueule en démarrant. Quatre flics me pincent en flagrant délit. Le feu venait de passer au rouge, les voitures à trente mètres n'avaient aucune chance de me dégommer. Bref, pas le moindre danger. Un flic me demande une pièce d'identité. Un autre, sourire aux lèvres : "Vous êtes étudiant ?" Moi : "Pouquoi me demandez-vous ça?" "Non, c'est juste qu'on a vu l'autocollant anti-CPE collé sur votre sac." "Oui, et alors. C'est pas pour ça que vous m'arrêtez, si?" En fait, je pense que c'est pour ça qu'ils m'ont verbalisé. Je m'explique: il m'est déjà arrivé de griller un feu rouge sous les yeux d'un flic qui m'a réprimandé sans me coller d'amende. Donc, le jeune flic un peu curieux s'éloigne un peu, puis revient: "Vous savez, moi aussi je suis contre le CPE. Si je vous demandais ça, c'est juste parce qu'on voudrait savoir s'il y a une manif demain." Moi: "Oui, comme tous les jours. J'y serai, mais je suis absolument contre ceux qui balancent des pavés dans la gueule des CRS." Le flic qui me verbalisait me demande mon adresse actuelle. Je commence par lui donner la bonne : "11 rue de Cassel..." Puis je réfléchis un brin (ça m'arrive) et je leur ai donné une fausse adresse: "Non, je confonds toujours. En fait c'est 10 rue de Cassel. C'est à Lambersart." Je ne paierai pas l'amende de 90 euros et je ne veux pas perdre mes points de permis pour ça. Ils n'ont pas mon adresse, pas mon numéro d'immatriculation, en plus je n'ai pas reconnu l'infraction (j'ai dit que le feu était orange), je déménage bientôt, et il y a la présidentielle dans un an (donc l'amnestie). Je parlais récemment de désobéissance civile : je suis prêt à aller plaider ma cause devant le tribunal. Parce que j'ai comme l'impression d'avoir été verbalisé pour être contre le CPE. Parce que je n'ai pas été dangereux du tout. Parce qu'il faut encourager les cyclistes en ville plutôt que de les verbaliser.
Après m'avoir verbalisé, les flics s'attaquent à un type qui les photographiait en train de me mettre à l'amende. Ils lui demandent d'effacer ses photos. Cette fois-ci, je suis énervé: "C'est illégal ce que vous faites. Il a tout à fait le droit de vous photographier dans l'exercice de vos fonctions. Je suis étudiant en journalisme et c'est ce qu'on m'a appris." Le flic s'énerve: "J'vous parle à vous. Rentrez chez vous." "J'ai le droit de rester et d'avertir Monsieur de ses droits." Je reconnaîs que je suis un chieur, mais ça m'énerve de voir des flics abuser de leur autorité. C'est pourtant terriblement humain: donnez un peu de pouvoir à une personne, il aura tendance à s'en servir à mauvais escient. J'ai un ami flic, je ne suis pas anti-flic, il en faut, mais j'aimerais simplement qu'ils remplissent leur mission (assurer la sécurité publique) sans chercher à faire du chiffre à tout prix (directives actuelles de Sarko).

Tuesday, March 21, 2006

Culture antipub

En avant-première, voici un article qui paraîtra dans Le Poing, notre magazine de fin d'études.
Les barbouilleurs d'affiches, autrefois cantonnés aux couloirs de métro, investissent désormais les tribunaux.

Les Déboulonneurs de Lyon ont mené leur première action en février
Finies les opérations cagoulées à saccager les stations de métro, l’heure est à la désobéissance civile. “On transgresse la loi et on assume les conséquences”, explique David Sterboul, un "déboulonneur" parisien. “On barbouille de grandes affiches publicitaires. Puis on attend la police pour se faire interpeller. Quand elle arrive, on tend notre carte d’identité en disant : “C’est moi qui l’ai fait””, renchérit Guillaume Gamblin, jeune "déboulonneur" de Lyon. Ce nouveau mouvement antipub s’inscrit dans la démarche d’action non-violente, jugée plus efficace. Leurs revendications? Rendre illégales les affiches géantes qui envahissent les rues. “On demande que la taille des affiches soit limitée à 70 cm sur 50 et qu’un nombre maximal soit fixé en proportion du nombre d’habitants.”
Les Déboulonneurs sont les derniers venus dans la galaxie des antipubs. Leur groupe est né à Paris. Plusieurs adeptes des opérations commando se sont recyclés dans ce mouvement. Arthur Lutz en fait partie. Avec 61 camarades de combat, il a comparu devant la justice pour avoir “dégradé du mobilier” à l’automne 2003, autrement dit pour avoir arraché et tagué tous les panneaux publicitaires d'une station de métro : “Métrobus demandait un million d’euros de dommages et intérêts. On a organisé notre défense en créant le Collectif des 62. Au final, on a été condamnés à leur verser 15000 euros.” Arthur a depuis intégré les Déboulonneurs : le quatrième vendredi de chaque mois, ils barbouillent une affiche dans l'espoir d'être jugés au pénal pour pouvoir faire le procès de la publicité.

Les Déboulonneurs regrettent que la municipalité de Lyon ait autorisé JC Decaux à installer de nouveaux panneaux publicitaires en échange de la mise en place d’un système de location de vélos gratuits.
“Obéis, consomme”, “Légitime réponse”, “Pub = violence”, “Harcèlement psychique”... Ironie de l’histoire, les antipubs reprennent ce qui fait le succès de la pub, des slogans chocs qu'ils taguent sur les affiches.
Plusieurs comités locaux ont emboîté le pas des Déboulonneurs parisiens. Premiers à toucher le pactole : les Montpelliérains. Pour leur première action en février, ils ont été interpellés et une procédure au pénal est lancée contre eux.
Les Déboulonneurs font souffler un vent de jeunesse sur un mouvement déjà bien organisé. Dans la galaxie antipub, il y a d'abord Résistance à l’Agression Publicitaire, les précurseurs. Ce mouvement créé en 1992 s’est attaqué à la surcharge publicitaire dans les boîtes aux lettres, à l’invasion de la pub dans le domaine artistique, notamment au cinéma, ou plus récemment à son intrusion à l’école. Il y a aussi les Casseurs de pub, les médiatiques, installés à Lyon. Ils publient un hors-série annuel, sans publicité bien entendu, et organisent diverses manifestations (la semaine sans télé en avril, la journée sans achats en novembre). “On va à la sortie des centres commerciaux pour distribuer des bons de non-achat”, explique Bruno Clémentin, fondateur du mouvement en 1999. Il y a encore le Publiphobe, une autre publication à l’origine des premiers barbouillages. Enfin, il y a Paysages de France, une association qui a choisi la voie juridique. Un hideux pylône vante un fast-food en bordure de voie express. Sa hauteur respecte-t-elle la loi ?
Tous ces groupes veulent atteindre le même objectif : arrêter de considérer l’homme comme un consommateur et la pub comme un créateur de besoins. Refuser de vendre, comme Patrick Le Lay, PDG de TF1, “du temps de cerveau humain disponible à Coca-Cola”.

Le Rennais rentre dans le Lyon

Petite virée à Lyon vendredi pour rencontrer les deux fondateurs de Casseurs de Pub et du journal La Décroissance.

Bruno Clémentin

A côté de Bruno Clémentin, Vincent Cheynet.
Le soir, j'ai assisté à un colloque très intéressant sur la désobéissance civile. Le 11 septembre 1906, Gandhi lançait sa première campagne de désobéissance civile.
José Bové s'est excusé parce qu'il n'avait pas pu venir (il était à une soirée de soutien pour une députée bolivienne menacée par la CIA). Il y avait en revanche Jean-Marie Muller, le président du Mouvement pour une alternative non-violente. Passionnant à écouter : "Notre société est formatée par la culture de l'obéissance. En famille, à l'école, à l'église, dans la vie professionnelle, dans l'armée... Le bon citoyen est le citoyen obéissant. L'obéissance est récompensée, la désobéissance punie. La société est régie par la loi qui est la règle du jeu. La loi garantit normalement la justice. Mais que faire quand une loi est injuste ? La désobéissance civile, c'est la remise en cause de la pratique de la loi et non de son principe. Ce qui devrait fonder la citoyenneté, c'est la responsabilité et non l'obéissance. Selon John Rawls, chaque citoyen doit décider en conscience de ce qui est conforme au droit. Il faut distinguer ce qui est légal (conforme à la loi) de ce qui est légitime (conforme au droit). Il faut aussi distinguer l'objection de conscience (refus d'un individu d'obéir à un ordre parce que l'ordre n'est pas conforme au droit, à la morale, à l'éthique) de la désobéissance civile qui est avant tout une démarche politique. L'objectif politique, qui est de faire changer la loi, prime sur la conscience. Il faut un objectif clair, précis et possible. Sinon, la stratégie est vouée à l'échec. Gandhi n'a pas demandé directement l'indépendance de l'Inde directement, il a voulu l'abrogation de la loi sur le sel qui était un symbole du colonialisme britannique". Le génie de Gandhi a été de prendre un acte à la portée de tous. C'est le principe d'une insurrection pacifique. Le désobéissant se heurte à la répression de l'Etat : Gandhi a été emprisonné. Mais pour lui, il faut se soumettre. Je n'en suis pas aussi sûr, il faut se méfier du Gandhi-ra-t-on ! Car si la loi est injuste, la répression aussi peut l'être. C'est le discernement tactique qui permet de juger s'il faut se soumettre. Il est souvent nécessaire d'accepter la répression pour interpeller l'opinion publique. Mais il faut s'adapter aux circonstances, à la réalité du terrain. Par exemple, des policiers nancéens ont désobéi en clandestinité sous Vichy. Il leur était impossible de le faire à découvert et en acceptant la répression."
Méditez bien sur ces belles paroles et choisissez votre cheval de bataille (les OGM, les pubs, le nucléaire, les fast-food...)
Pour finir, quelques photos de mes pérégrinations dans Lyon. Spéciale dédicace à mon frère qui y a étudié et rêve d'y retourner et à Marie qui m'a gentiment hébergé chez elle.

A tout seigneur, tout honneur... La mairie de Gérard Collomb


La fontaine place de la mairie

Une autre fontaine, regardez bien l'arrière plan ! Petit jeu : sur quelle place se trouve-t-elle ? Un demi en jeu

La colline de la Croix-Rousse


Le contre-champ : belles vues depuis la Croix-Rousse

La basilique Notre-Dame de Fourvière

Et pour finir au septième ciel, le théatre des Célestins

Petit post superficiel

Hier soir dans Jour après jour (émission dont je salue le travail des JRI, aussi appelés caméramen en langage courant), Jean-Luc Delarue s'est penché sur une question de société majeure. Le thème était "J'me sens pas belle" et les invitées avaient toutes des problèmes avec leur physique. Jean-Luc a ouvert le débat en donnant un chiffre : "Seules 10% des Françaises se trouvent vraiment belles. Est-ce à dire que 90% sont moches ?" Au menu des reportages, chirurgie esthétique, speed-dating, relooking... Pour apporter ma pierre à ce grand débat sociétal, je vous propose ces deux photos de Maud, une amie de l'ESJ qui a récemment expérimenté un extenso cera thermic. Comme dirait Arlette Chabot, à vous de juger ! Moi, j'aime bien le résultat.

AVANT

APRES

Monday, March 20, 2006

Basket-politique

Ou comment allier deux centres d'intérêt ? Petite leçon de journalisme. Ecrit dans la Voix des Sports cette semaine : "L'USVO signe un Contrat Première Equipe en battant Bourges, mais sa situation reste un brin précaire. En effet, défaites de 12 points à l'aller, les joueuses de Laurent Buffard ne sont pas parvenues à récupérer le point-average. Tout faux pas est donc proscrit sous peine de voir Bourges virer en tête. La période de consolidation est de quatre matchs."
Mais l'info essentielle du week-end se situait dans la page de résultats. L'OSML, mon équipe, a battu Templeuve 62-52. Cette fois-ci, on est officiellement champions. Merci.

1500000 manifestants. Et moi et moi et moi ?

Ce qu'il y a de bien avec les manifs, c'est que l'on peut prendre les chiffres qui nous intéressent. Vous êtes Villepiniste et pro-CPE ? Pas grave, selon la police, il n'y a eu "que 500000" manifestants dans les rues samedi. Vous avez le coeur à gauche et êtes anti-CPE ? Pas de problème, les syndicats annoncent qu'il y a eu 15000000 personnes à défiler. Vous ne serez donc pas surpris que je reprenne ce deuxième chiffre. Pour ma part, j'ai manifesté à Lille. Un raz-de-marée impressionnant, une vague de bonne humeur dans un océan de précarité. Ca rend lyrique de manifester contre un poète comme Villepin. Mais bon, vu que Dominique "entend ceux qui manifestent mais aussi ceux qui ne manifestent pas", on est mal barré. Tant qu'il n'y aura pas 60 millions de Français dans la rue, tant que les sondages ne donneront pas 100% des interrogés anti-CPE (remarquez, on n'en est plus très loin), Dominique restera droit dans ses bottes. Allez, fais pas la gueule. On n'en veut pas du CPE, on ne veut pas être sur un siège éjectable pendant 2 ans. Tiens, au fait, t'as été choisi premier ministre pour combien de temps, déjà ?

Une photo prise du balcon de Mélanie Morin


Allez, Mademoiselle, on lève son poing bien haut pour la photo. C'est pour la bonne cause (notre mag de fin d'études)

Thursday, March 16, 2006

Guitare contre matraques

Pas de manif aujourd'hui. J'avais un rendez-vous professionnel à l'heure où les étudiants se mobilisaient. Dommage car l'ESJ s'est enfin bougé le c... Mais je me rattraperai samedi!
A mon retour sur Lille, il y avait encore un peu d'animation. Les CRS bouclaient la rue Solferino où se trouve le siège de l'UMP. J'ai pu tirer deux choses de cette confrontation. La première, c'est qu'il vaut mieux savoir courir vite quand tu fais le con à une manif, en tout cas plus vite que les CRS. La deuxième, c'est une photo amusante d'un jeune un brin déjanté qui s'est mis à narguer les CRS pour amuser la galerie.

Tuesday, March 14, 2006

Libérez Aurélien, enfermez de Villepin !

Sous les briques, la plage ! J'ai enfin pu manifester contre le Contrat Premières Emmerdes aujourd'hui à Lille. C'est fou ce que ça peut faire du bien de gueuler contre Villepin, Sarko et compagnies (républicaines de sécurité).
J'ai discuté avec plein d'étudiants sympas. Faut dire que j'avais pas trop le choix : j'étais le seul représentant de l'ESJ. Ah non, j'oubliais Caroline, une étudiante de deuxième année... actuellement en stage à France 3 et venue couvrir la manif.

On a bien chanté : rame, rameur, ramer, on avance à rien dans cette société, Villepin nous mène en bateau... Villepin si tu savais, ta réforme, où on s'la met... Au cul, au cul, aucune hésitation, non, non, non, non au CPE... Amis entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines... Un seul regret : je voulais qu'ils passent Chirac en prison (oui, cette chanson m'obsède) mais les organisateurs ont refusé "car c'est trop politique". Mais bon, on a quand même pu gueuler "Libérez Aurélien, enfermez de Villepin !" Car nos amis les CRS nous ont bien aidés. Arrivés sur la Grand'Place, on savait plus trop quoi faire. Et on a appris qu'un manifestant avait été interpellé. Ni une, ni deux, même si les organisateurs n'étaient pas trop chauds ("ça risque de partir en couille"), on fonce (enfin, à vitesse de manifestants) au commissariat central de Lille. On est fraîchement accueillis par un cordon de CRS qui nous barre la route. On se tient à distance raisonnable et on gueule comme des putois "libérez notre camarade" ou "rendez-nous l'otage". Comme on est des jeunes civilisés, ça n'a même pas dégénéré. Pour la petite histoire, renseignements pris auprès de quelques CRS ou policiers en civil, notre camarade Aurélien avait lancé des bouteilles en verre, ce qui, en plus d'être dangereux, n'est pas très écologique. Du coup, j'ai laissé Aurélien méditer dans sa cellule. Mais bon, je m'égare. Ce qu'il faut retenir, c'est que "avec le CPE, on s'fait tous entuber" et qu'avec quelques manifs, c'est sûr, on va gagner.

Monday, March 13, 2006

La pêche ou le prêche

Voici un petit texte que j'avais écrit à l'école voici quelque temps et que j'avais omis de publier sur mon blog. A méditer pendant le Carême...


Il comptait filer à l'anglaise, c'est raté. Le jour même où ses fidèles se rassembleront dans la cathédrale de Saint-Paul pour fêter Pâques, l'évêque anglican de Londres fera escale au port de Benghazi en Libye. Monseigneur Richard Chartres va en effet mettre les voiles en plein Carême pour une croisière de luxe avec son épouse. Au moment où le Pape Benoît XVI parle d'amour dans sa première encyclique, l'église anglicane montre par les actes comment l'entretenir.
L'évêque voguera en Méditerranée à bord du Minerva II. Sa balade romantique le conduira en Espagne, en Tunisie, en Libye, en Egypte et à Chypre. Tout ça sans débourser le moindre penny. Ce voyage de 7000 livres (10000 euros) lui est offert par la compagnie maritime. En échange, il donnera des conférences à bord sur les ascensions et chutes de Rome, Carthage et de l'Egypte des pharaons. Quant à son épouse, elle compte financer son voyage en travaillant pour la bibliothèque du luxueux paquebot.
C'est le sérieux Sunday Times qui a lancé la polémique. Le pont de l'évêque fait tout un fromage outre-Manche. Alors que les Anglicans, comme les autres, voient leurs églises se vider, ils ont du mal à avaler la pilule. Même un proche collaborateur de l'évêque s'interroge dans la presse, sous couvert d'anonymat: "Quel type de leadership cela montre-t-il?"
Sur la défensive, l'évêché embarrassé a publié un communiqué pour justifier ses vacances: "La série de conférences de l'évêque fait partie de son congé sabbatique à venir, le premier en trente ans de ministère." En attendant, les journaux ne pardonnent pas à l'évêque ce péché de luxe et la croisière de rêve est en train de tourner au chemin de croix.

Friday, March 10, 2006

Le roi des bons plans

Une place à un concert de Monsieur Roux et des Doigts de l’Homme ? Zéro euro.
Un match de foot de Ligue 1 en tribune presse ? Zéro euro.
Une visite à la dernière exposition sur la fascinante abiose des bradypes ? Zéro euro.
Un CPE ? 24 mois de galère, à devoir obéir au moindre desiderata du boss au risque d’être licencié sans raison.
Il y a des choses qui n’ont pas de prix. Pour tout le reste, il y a la carte de presse.
Bien sûr, techniquement, je n’ai pas encore le fameux sésame. Si j’ai bien compris, je pourrai la demander après trois mois de travail (si tant est que ma carrière de journaliste surpasse le CDD de deux mois qui m’attend à la sortie de l’ESJ). Mais j’ai trouvé un substitut bien pratique. Hier soir, je suis allé à un concert des Doigts de l’Homme au Diapason à Rennes. Une belle petite salle, trop vite remplie. On arrive, c’est complet. Je montre ma carte de correspondant local Ouest-France et on me laisse rentrer gratuitement. La propriétaire de la salle vient même m’accueillir à bras ouverts, un brin étonnée : "Y a quelqu’un d’autre d’Ouest-France qui vient de partir." Moi, fieffé menteur : "Il a dû y avoir un malentendu à la rédaction, ça arrive de temps en temps."

Bref, tout ça pour dire que les Doigts de l’Homme, c’est du très bon jazz manouche. L’excellent guitariste ajoute sa touche humoristique au spectacle. Seul hic : ce sont vraisemblablement des adeptes de la Méthode Cauet. Ils ont en effet emboîté le pas de l’animateur le plus intelligent de TF1 (avec le QI d’une moule) qui parla naguère d’Auschwitz comme d’une belle baraque à retaper. Dans la même veine, les Doigts de l’Homme ont intitulé un de leurs morceaux Camping sauvage à Auschwitz pour rappeler que les tziganes aussi ont été victimes de la barbarie nazie. Mise à part cette petite faute de goût, ce groupe qui vient d’"Ardèche du Nord" est vraiment très recommandable.

Petite photo qui n’a rien à voir avec ce post mais qui est destiné à le rendre plus sexy afin qu’il soit plus lu.

Petit message à destination des étudiants de Pharma de Rennes :
VOTEZ GUITOU. GUITOU VA JUSQU’AU BOUT.

Thursday, March 09, 2006

APRES COUP

Sorj, si tu me lis…
"Français, pourquoi avons-nous si mauvaise réputation ?" En voilà, une question ! On serait arrogant, râleur, malpoli, nul en langue étrangère… J’en passe et des meilleures. Heureusement, Jean-Luc est arrivé-é-e ! Et il nous a remis à notre place en deux temps trois mouvements. La France est un beau pays, le seul problème, c’est les Français. Belle analyse, merci Jean-Luc ! Vive le service public télévisuel, qui se met au service du public pour l’accabler de tous les vices.
Dans la famille déclinologue, on a eu droit à la chef d’entreprise bête et méchante, avec un pull rose bonbon qui ne déparerait pas sur ce blog. "On a un problème en France, c’est la difficulté à trouver de la main d’œuvre." C’est vrai qu’il n’y a que trois millions de chômeurs dans notre mââââgnifique pays. "Oui, mais les chômeurs sont des fainéants." Suis-je bête ? J’oubliais ce détail. "Et le déclin français, c’est la faute aux 35 heures." Vilain Jospin !
Yo-yo n’a pas été le seul à en prendre pour son grade hier soir. C’est toute la classe politique qui a été épinglée, égratignée, écorchée, triturée. "Aujourd’hui, il faut parler une ou deux langues étrangères pour trouver un boulot. Vous connaissez un seul homme politique qui décrocherait un poste de standardiste ?" Mais faut les excuser quand même parce que, comme l’a fait remarquer un Américain présent sur le plateau, les petits Français apprennent à l’école l’Anglais du 19e siècle, pas celui qui permettrait de discuter avec Bill Gates ou Sharon Stone.
Un grand moment, ce Ça se discute. Comme quand le réalisateur québécois André Maurice fit l’éloge de la lingerie féminine portée par les Françaises. Delarue : "Vous parlez du string ?" Maurice : "Oui, vous savez, au Québec, il fait froid."
Et pour finir cette belle émission, un jeune titi afghan se remémore son arrivée à Paris, sa découverte du métro, son indignation à la vue d’un SDF et sa surprise en voyant un couple s’embrasser en public. Ah, le French kiss, ça manquait à l’appel ! On l’a notre réponse, c’est sûrement pour ça qu’on a mauvaise réputation.

C’était mercredi à 22h48 dans Ça se discute sur France 2.

Wednesday, March 08, 2006

Croire en la décroissance


J’ai une très saine lecture en ce moment, que je ne saurais que vous recommander. C’est un livre du Breton Jean Aubin, ancien agriculteur bio devenu prof de maths, fervent partisan de la décroissance. Son bouquin s’intitule d’ailleurs Croissance, l’impossible nécessaire. En couverture, on y voit une main qui presse la Terre sur un presse-oranges. Le message : on ne peut pas courir derrière une croissance infinie alors que les ressources de notre planètes sont limitées. Un constat : 20% de l’humanité consomment 80% des richesses (et vice-versa). Et plein de conseils : faites du vélo, mangez des produits locaux de saison, portez des pulls en hiver au lieu de chauffer comme des dératés, etc… Pour ceux qui ont la flemme de le lire (mal vous en prend), j’ai sélectionné quelques passages que je juge particulièrement instructif. Bonne lecture !

Vive la croissance ?


L’expression croissance zéro fait figure d’épouvantail. Elle renferme une connotation négative de stagnation ou d’immobilisme. On le regarde comme une menace. Le PIB, c’est la richesse, et la richesse, c’est le bien-être, n’est-ce pas ? Pas si sûr ! Car le PIB mesure en fait l’argent qui circule, sans juger le côté bénéfique ou non des objets fabriqués ou transformés, ni la réalité des services rendus. Pour faire croître le PIB, que faut-il donc ? Pousser à fond le chauffage au point de devoir ouvrir les fenêtres pour se rafraîchir ? Multiplier les transports inutiles, emporter des bouteilles d’eau de source des Alpes vers les Côtes d’Armor où l’eau devient imbuvable, importer des porcs danois vers la Bretagne, et des porcs bretons vers l’Allemagne ? Augmenter la consommation d’antidépresseurs, favoriser les accidents, les attentats et le vandalisme ? Après tout, les voitures qui brûlent, l’accident du tunnel du Mont-Blanc et le naufrage de l’Erika sont des facteurs de croissance : il faut réparer les dégâts, il faut faire dépolluer les plages (par des entreprises, car les bénévoles n’apportent rien au PIB). Et le tremblement de terre de Kobe, qui a tué 5000 Japonais et fait 100 milliards d’euros de dégâts a été une formidable aubaine qui a permis de relancer l’économie japonaise. Dans la même optique, à défaut d’une bonne guerre, il serait bénéfique de bétonner les Gorges du Tarn ou le Cap Fréhel pour les recouvrir d’hôtels. En revanche, la jeune mère qui décide d’allaiter son bébé est une dangereuse irresponsable, car au lieu de travailler à la croissance en achetant biberons, lait en poudre et chauffe-biberon, elle lui fournit un lait gratuit, rendez vous compte ! Ajoutez le fait que le bébé, protégé par les anticorps maternels, aura moins besoin de médecin et de médicaments, et vous comprendrez que cette pratique conduit à la baisse de l’activité économique et devrait être interdite. Et que dire aussi des grands-mères qui reprisent gracieusement les chaussettes, sinon qu’elles se font de plus en plus rares, heureusement ? Et de l’entraîneur bénévole de l’équipe de basket ?...

Vive le nucléaire ?


Du fait de sa radioactivité, le plutonium disparaît, mais très lentement. Sa demi-vie est de 24000 ans, ce qui veut dire qu’il faut 24000 ans pour que les quantités soient réduites de moitié, 48000 ans pour qu’elles soient divisées par quatre, et ainsi de suite. Dans 240000 ans, il en restera peu, le millième de ce que nous accumulons aujourd’hui, mais vu les quantités produites et les propriétés extrêmement dangereuses de ce produit, c’est encore beaucoup (le stock actuel serait de près de 2000 tonnes, dont 250 tonnes de plutonium militaire, très concentré, provenant du désarement américano-soviétique). Et 24000 ans, 240000 ans, ce n’est pas demain. 24000 ans, c’est plus loin de nous dans l’avenir que les peintures de Lascaux dans le passé. 240000 ans, c’est la moitié du temps qui nous sépare de la maîtrise du feu par l’homme… Les autres déchets nucléaires se comportent de manière analogue, avec une vitesse de disparition plus ou moins grande.
Utiliser le nucléaire, c’est obligatoirement produire de tels déchets. C’est donc se condamner à les gérer pendant des centaines de milliers d’années. On peut bien sûr affirmer que les sociétés humaines, de plus en plus développées, auront toujours les capacités nécessaires, capacités scientifiques et techniques, économiques et politiques. Cela signifie bien entendu que, pendant ce petit bout d’éternité, aucune des sociétés détentrices de ces stocks de déchets ne retournera à une sorte de Moyen Âge technologique ; qu’elles auront toujours les moyens financiers nécessaires à cette gestion, et qu’elles n’estimeront jamais avoir d’autres chats à fouetter ; que sur ces centaines de milliers d’années, aucune période de troubles, d’anarchie, de chaos, ne viendra remettre en cause ce programme… Les romains devaient avoir ce genre de certitudes au plus fort de la prospérité de leur empire.

PS : Après l’arrêt du surgénérateur Superphénix en 1997, 14 tonnes de plutonium ont été entreposées dans un hangar voisin du réacteur. Un réacteur qui contient toujours 5500 tonnes de sodium fondu dont on n’a pas encore réussi à se débarrasser. Le sodium explose au contact de l’eau et peut s’enflammer tout seul au contact de l’air. Depuis 1997, son maintien en fusion à 180° consomme autant qu’une ville de 40000 habitants. Vivement l’ITER !

L’éolien, c’est du vent ?


Faisons un calcul, à la louche. La France dispose de 58 réacteurs nucléaires. En tenant compte des arrêts pour maintenance, disons pour simplifier que chaque jour 50 sont en état de fonctionner. La puissance de chaque réacteur étant d’environ 1000 mégawatts, cela nous donne une puissance totale de 50000 MW. Côté éolien maintenant, la puissance moyenne de chaque machine augmente chaque année. On installe maintenant des éoliennes de 2,5 MW, voire même 5 MW. Restons sur 2,5 MW dans les années qui viennent. Pour remplacer les 50000 MW du nucléaire, il faudrait donc 20000 machines de ce type en fonctionnement et, comme chacune ne tourne en moyenne que le quart du temps, quand il y a du vent, nous arrivons à un total de 80000 machines à installer, c’est-à-dire deux ou trois par commune.
Seulement, une éolienne, c’est bruyant ! Pensez, au pied du pylône, cela fait autant de bruit qu’un frigo, alors à 500 mètres, imaginez le vacarme ! En plus, c’est laid ! Ah bon ? Question de goût. Mais il faut reconnaître que face aux élégantes tours de retransmission pour téléphones portables et aux pylônes des lignes à haute tension qui égayent nos paysages, face aux zones commerciales si pittoresques aux abords de nos villes, on est en droit de se demander si une éolienne ne va pas gâcher des paysages tellement bien préservés jusqu’à présent. Rendons hommage aux défenseurs du beau, si soudainement tatillons sur le sujet. Remercions-les également de donner à cette appréciation esthétique personnelle toute la place qu’elle mérite, face aux problèmes négligeables posés par l’effet de serre, l’accumulation des déchets nucléaires ou le démantèlement des centrales.

Vive le progrès ? Ou le Cauchemar de Darwin 2


Voici cinq ou six ans, peu de gens avaient le sentiment de souffrir du manque de téléphone portable. Voici dix ou douze ans, le manque d’ordinateur laissait encore de marbre une fraction importante de la population. Et, si on avait trop chaud en voiture, sur la route des vacances, la chaleur de l’été était bêtement considérée comme normale. Inconscients que nous étions ! Heureusement, toutes ces souffrances ignorées nous ont été révélées, et le remède nous est abondamment offert, pour le plus grand bien de l’activité économique. Oui ! L’ordinateur est venu, et la clim, et le portable ! Et nous savons que ce n’est pas fini. Il faut changer régulièrement tout cela. L’ordinateur a besoin de cinquante fois plus de vitesse et de vingt fois plus de mémoire et sera bientôt doté de la fonction grille-pain ou lampe à bronzer. Le téléphone prend des déjà des photos, mais demain matin, il fera rasoir électrique pour les messieurs, épilateur pour les dames. Et tant pis pour les gorilles ! Comment cela, les gorilles ? Ah oui, j’oubliais, c’est juste un détail : figurez-vous que pour fabriquer ces petites merveilles électroniques, on a besoin de tantale. Ce métal rare est donc très recherché. Des mines ont été ouvertes dans l’ex-Zaïre (RDC). Et en pleine forêt équatoriale, la cantine des mineurs est quelque peu rudimentaire. Ceux-ci doivent se nourrir avec les moyens du bord, en l’occurrence la viande de brousse fournie par les braconniers. La viande de brousse est composée pour l’essentiel des singes de la forêt, notamment les gorilles, qui passent ainsi à la casserole.

Tuesday, March 07, 2006

Le CPE, aspirateur d’avenir

Aujourd’hui, grosses manifs contre le Contrat Premières Emmerdes. Malheureusement, je ne peux y être car je vais passer quelques jours en Bretagne. Je suis dans le train-train quand la France est dans la rue. Pour me rattraper, je l’écris haut et fort sur mon blog : AUX CHIOTTES VILLEPIN ! Pour ce qui est du CPE, le plus simple pour donner mon point de vue est de vous livrer ce beau courrier de lectrice (Elodie Nicou, une Nantaise) trouvé dans le Libé du jour.

Regardez. Tendez un peu l’oreille. Ecoutez notre petite voix étouffée par le piaillement d’un poulet en perdition et le bourdonnement d’un moustique serial-killer. Nous sommes là, oui là, juste derrière eux. Bien sûr, nous ne sommes plus classés number one dans le top 50 des sujets du JT mais nous ne sommes pas résignés pour autant. Regardez-nous. On ne vous dit rien ? Cheveux savamment décoiffés, sac pendouillant sur notre épaule insolemment rejetée en arrière, yeux un brin moqueurs, sourire faussement désabusé, acné juvénile à peine effacée. Ça y est ? Vous nous remettez ? Eh oui, nous sommes les é-tu-diants ! Nous avons ouï que l’un de vos charmants confrères nous a qualifiés de bourgeois et nous a lancé le défi de mobiliser les pauvres jeunes des banlieues. Ceux que seuls le CPE concerne selon lui. Ceux qui selon le gouvernement ont l’air de se taire et d’accepter alors qu’il nous semble qu’ils ont vaguement fait part de leur ras-le-bol général il y a quelques mois. Peut-être le gouvernement est-il sourd ? Nous proposons une collecte pour un achat massif de sonotones. Mesdames et Messieurs, soyez généreux ! Bref. Revenons à notre mouton embourgeoisé. Voici son histoire. Le bourgeois étudie à l’université. Les lieux sont confortables. Les livres dans lesquels il se plonge à l’occasion le protègent du monde extérieur : celui où l’ouvrier sue sang et eau pour un Smic de misère. Mais foncièrement, il se fout des lois qui passent ou non. Car ne l’oublions pas, c’est un bourgeois et tous les bourgeois des facs feront de la recherche plus tard et ces gens-là, paraît-il, dorment bien à l’abri dans une chaire d’université, loin du monde qui tourne mal.

Seulement voilà, ceci n’est qu’une histoire. Et comme toutes les belles histoires, elle est fausse. Car le bourgeois dont nous parlons étudie bien dans une université confortable, sauf que pour y avoir droit, Môssieur le bourgeois travaille à mi-temps chez un roi du fast-food ou un magnat de la vente. Il enchaîne heures de cours et de boulot pour pouvoir se payer un studio avec WC dans la cuisine avec ses 500 euros mensuels. Il roule avec une voiture qui a eu 20 ans vingt ans avant lui, mange des pâtes à tous les repas et sort quand ses moyens le permettent, c’est-à-dire au terme de six mois de serrage de ceinture.
S’il fait tout ça le bourgeois, c’est qu’il espère ne plus avoir à le faire plus tard car on lui a toujours dit qu’en étudiant on va loin. Seulement aujourd’hui cette belle croyance est en déroute. Il sait bien qu’aujourd’hui la plage a cédé sa place aux pavés. Mais malgré tout, il ne veut pas laisser le bitume gagner du terrain encore et encore. Il veut défendre à n’importe quel prix les derniers grammes de sable fin qu’on lui avait promis. Et le CPE est un aspirateur à sable fin, un empêcheur d’illusions, la prohibition des rêves. Deux ans, 730 jours, 17520 heures, 1051200 minutes. Voici quantitativement la dose d’attente et de pression auxquelles aura droit notre bourgeois une fois qu’il aura quitté le giron de la mère université car comme la majorité des bourgois, il n’y fera pas carrière et cherchera une place dans une entreprise.
Deux longues années en suspens. Comment acheter une voiture ? Voyager ? Louer un appartement ? Comment faire toutes ces choses qui font rêver n’importe quel jeune adulte quand une épée de Damoclès plane aussi lourdement au-dessus de nos têtes ? Et ne croyez pas que cette galère s’arrête à 26 ans, car là, le père du CPE, le CNE, prend le relais !
Bientôt, la France sera un pays de main d’œuvre docile et bon marché. Bientôt nous deviendrons le nouvel eldorado des multinationales qui veulent produire à moindre coût. Bientôt le respect des droits de l’homme n’aura plus de sens pour un peuple anesthésié.