Kispasse

Wednesday, July 27, 2005

Titou, pianiste à trois roues

Contrairement à sa pianocyclette, Thierry Bourdin a deux moteurs : le piano et les voyages. Avec son vélo doté d’un piano, ce Nolfféen est devenu une attraction du festival Jazz à Vannes.

Il a les habits de Charlot, mais n’en est pas un. Il a le statut d’intermittent du spectacle, mais son amour du piano est bel et bien permanent. Son surnom est Titou, mais ce grand voyageur ne tient jamais longtemps à la maison. Thierry Bourdin cultive le paradoxe.
A 43 ans, cet habitant de Saint-Nolff a déjà 40 ans de piano derrière lui : "J’ai commencé en copiant mon grand frère. Puis j’ai suivi une formation classique." Le déclic pour le jazz viendra plus tard, à 17 ans, en écoutant un disque d’Erroll Garner. Le virus ne l’a plus quitté. Il aime tout particulièrement Keith Jarret, Michel Petrucciani ou encore Jacky Terrasson qu’il a eu "la chance de rencontrer à Vannes".
Autodidacte du jazz, Titou fait partie d’un groupe, un quintet baptisé Prézzaj car "ça fait jazz en verlan". Il a aussi participé au festival vannetais avec le Jazz Groupe de Bretagne : "Je jouais avec un piano fixe dans la rue. Je voyais les autres musiciens qui pouvaient se déplacer en jouant. Je trouvais ça dommage de ne pas pouvoir bouger."
Alors, cet Inspecteur Gadget jamais à court d’idées a pensé à un triporteur. "C’est le directeur du festival Jazz à Vannes, Jean-Philippe Breton, qui m’a donné l’impulsion. Il m’a dit qu’il me prendrait au festival si je le faisais." La chance a fait le reste : "Je suis tombé sur Internet sur un artisan du Finistère spécialiste des vélos. On a cogité le truc tous les deux."
Et voilà comment Titou s’est retrouvé, trois jours avant le début du festival, avec un vélo noir flambant neuf muni d’un petit piano. Une acquisition qui le rend heureux : "Ce qui me réjouit, c’est de voir le sourire des gens." Il se plaît à imaginer qu’il va ainsi pouvoir amener le jazz à la rue : "Cette musique est souvent réservée aux endroits confinés." Un rôle de pédagogue en quelque sorte. Sa compagne Cathy, institutrice, est là pour l’épauler : "C’est elle qui s’occupe de la partie logistique. Les femmes sont plus douées pour cela", explique-t-il en rigolant. Titou et Cathy sont aussi de grands voyageurs. Ils sont partis pendant six ans voguer sous d’autres cieux. "On a fait le tour de la Méditerranée et une partie de l’Atlantique en voilier." Un prétexte pour de riches rencontres : "La musique est internationale. Elle passe au-dessus des langues."
Intermittent du spectacle, Titou a aussi beaucoup à dire sur la réforme initiée par le gouvernement Raffarin : "J’ai un tas d’amis qui ont été éjectés du statut et qui ne méritaient pas de l’être. Dans une société, la culture est vitale pour l’esprit et l’équilibre. C’est normal qu’elle soit soutenue par la collectivité. Ce qui a plombé le système, c’est l’explosion depuis dix ans du nombre de chaînes de télévision. Aidons les vrais intermittents !" Malgré sa pianocyclette, Titou n’a pas la tête dans le guidon et ne perd pas les pédales.

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