Kispasse

Monday, February 13, 2006

Du neuf sur Google News

Je casse du Google dans le Libé de demain. Je ne sais pas si c'est mon côté alter contre les grandes multinationales américaines ou bien mon côté réac contre le règne du tout-gratuit sur l'Internet qui met en danger (à mon humble avis) la culture et la presse écrite. C'est sans doute un mélange des deux en fait. Bref, voilà ce que ça donne.

La presse envoie sa facture à Google
Les journaux veulent faire payer les agrégateurs d'information sur l'Internet.


Après les majors du disque qui luttent contre le peer-to-peer et les éditeurs de livres qui s'inquiètent du projet de bibliothèque numérique universelle, les journaux s'attaquent à leur tour à la culture du tout gratuit sur l'Internet. Leur but : faire payer les agrégateurs d'informations du type Google News.

Les pros du mulot apprécient ces cyberrevues de presse qui mettent toute l'actualité sur une page web, en reprenant des informations issues de différents journaux en ligne. Or, les sites d'information ne sont pas consultés a priori pour savoir s'ils acceptent d'être référencés et cités. Encore plus problématique, les photos sont diffusées sans crédit (le nom du photographe, et éventuellement celui de l'agence qui distribue le cliché).

Moyens concrets. L'Association mondiale des journaux (AMJ), une organisation basée à Paris, a mis en place un groupe de travail chargé de réfléchir aux moyens concrets d'obliger Google et ses concurrents à "dédommager" les sites d'information référencés. "Les moteurs de recherche ne sont pas une nouvelle espèce de bienfaiteurs de l'information. Ce sont des organisations commerciales, à but lucratif, pas de nouveaux Robin des Bois", estime Gavin O'Reilly, le président de l'AMJ.

Chez Google, on ne voit évidemment pas les choses de la même façon. "Notre succès réside dans notre capacité à rediriger nos utilisateurs, aussi vite que possible, sur les sites où ils trouveront l'information, explique Nikesh Arora, vice-président de Google Europe. Les contenus en ligne et les moteurs de recherche sont des partenaires symbiotiques, c'est du donnant donnant."

Problème : 35 % des internautes se contentent de Google News sans aller voir plus loin sur les sites d'information. "Chaque éditeur peut, s'il le souhaite, nous demander de retirer ses publications, ajoute un représentant de Google France. Ensuite, nous sommes prêts à discuter pour trouver un terrain d'entente." D'accord pour négocier sur la longueur de l'extrait cité, mais pas pour mettre la main au portefeuille.

Cette controverse souligne le flou juridique de la notion de droit d'auteur sur le Web, qui varie selon les pays : "En France, le code de la propriété intellectuelle est plus contraignant qu'aux Etats-Unis", précise Jean-Frédéric Farny, du Syndicat de la presse quotidienne régionale (SPQR), organisation qui adhère à l'AMJ. Faute d'harmonisation, ce sont les tribunaux de chaque pays qui sont conduits à trancher lorsqu'ils sont saisis.

Grincement de dents. En Belgique et aux Pays-Bas où le service vient d'être lancé, Google News fait aussi grincer des dents. L'Association des éditeurs flamands estime que Google doit dédommager les journaux en ligne cités. En guise de mesure de rétorsion, le journal belge De Standaard a décidé de bloquer ses liens vers Google News.

Ces conflits entre éditeurs d'informations et moteurs de recherche ont pour toile de fond le partage des recettes publicitaires : "L'ironie est que ces agrégateurs existent principalement grâce aux éditeurs d'informations et qu'ils en profitent à leurs dépens, regrette Gavin O'Reilly. Les moteurs de recherche ont besoin de notre contenu pour prospérer. Ils bâtissent ainsi des plates-formes publicitaires attractives qui sont en concurrence directe avec les nôtres."

Là encore, Nikesh Arora défend sa compagnie : "Bien sûr, Google fait du profit avec la publicité. Quand les visiteurs cherchent des informations, nous ajoutons des liens publicitaires. Mais ces pubs n'ont pas d'effet sur le résultat de la recherche."

Le chiffre d'affaires de Google a effectivement de quoi aiguiser bien des appétits : 6,14 milliards de dollars, rien qu'en 2005. Un chiffre qui a pris la bonne habitude de doubler chaque année. Avec 13 millions de visiteurs chaque mois, Google s'accapare 80 % des recherches des internautes français. Des années-lumière devant ses poursuivants Yahoo et Voila, qui plafonnent autour de 6 % chacun. Google n'est pas du genre partageur.


L'AFP réclame des millions au moteur américain
L'agence assigne Google en France et aux Etats-Unis pour violation de copyright.


Si Google News se targue de donner accès à 500 sources d'information, il lui en manque une de taille : l'Agence France-Presse (AFP). Contrairement aux autres moteurs de recherche (Yahoo, MSN, Wanadoo, Voila), Google refuse de payer pour diffuser ses dépêches. Après plusieurs tentatives infructueuses pour que Google News cesse de référencer ses contenus sans abonnement, l'AFP a porté plainte en février 2005 en France, puis en mars 2005 devant les tribunaux américains pour violation des lois du copyright.

"Silence". L'Agence réclame 17,5 millions de dollars (14,7 millions d'euros) aux Etats-Unis et 2,8 millions d'euros en France. "On a longtemps essayé de discuter avec eux, mais on s'est heurté à un mur de silence, affirme Axelle Bloch, du service juridique de l'AFP. Leur ligne de conduite, c'est que tout est gratuit sur l'Internet. La nôtre, c'est qu'ils doivent payer pour diffuser nos contenus." Une stratégie à l'opposé de celle de Reuters, le concurrent britannique de l'AFP : "Google News apporte un trafic important à notre site sur lequel les internautes peuvent consulter gratuitement une partie de nos dépêches. Ce service profite donc aux deux parties."

Acculé, le géant américain a plié en retirant tous les articles et photos de l'AFP. Google avait adopté la même attitude en janvier quand le Syndicat de la presse quotidienne régionale (SPQR) avait lancé une procédure civile pour l'enjoindre de cesser de référencer ses titres. "Google ne répondait pas à nos recommandés, il a fallu qu'on les assigne en justice pour qu'un interlocuteur apparaisse, raconte Jean-Frédéric Farny, du SPQR. On nous a expliqué que c'était techniquement impossible. Comme on maintenait notre plainte, ils ont subitement trouvé comment retirer nos articles de Google News." Si ce geste a suffi pour que le SPQR retire sa plainte, l'AFP pour sa part l'a maintenue.

Audience. Les procédures seront longues. Aux Etats-Unis, il y aura quatre décisions de justice pour autant de motifs : contrefaçon des titres, des premières lignes des articles, des photos, et utilisation de nouvelles fraîches et inédites, ce qui constitue le "fonds de commerce de l'AFP", selon Axelle Bloch. Après la phase d'échange de pièces entre les parties, une première audience s'est déroulée le 11 janvier devant la cour fédérale de Washington sur la violation des droits d'auteur concernant les titres. La décision sera rendue avant la fin mars. Un précédent judiciaire vient conforter l'AFP dans son bon droit : en 2003, l'agence allemande DPA a gagné un procès similaire contre Google pour violation du copyright sur ses images.

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