Kispasse

Monday, July 30, 2007

Au Pont du rock, petit festival de caractère

C'est le plus vieux festival rock breton. Quand les Vieilles Charrues ont commencé à labourer les champs de Landeleau, le Pont du rock rugissait déjà depuis un an. D'abord au Roc Saint-André, bourgade méconnue, hormis par les Bretons qui boivent du Breizh-Cola puisque c'est là que se trouve le siège de l'entreprise. Puis à Malestroit, petite cité de caractère. Et ce festival ne manque pas de piment, avec une prog souvent musclée et taillée sur mesure pour les coeurs de rockeurs. On était encore 12000 cette année.
J'y ai fourbi mes armes de journaliste, en 2004 pour Le Ploërmelais (j'y avais rencontré Bénabar, Ska P, Sergent Garcia...) et en 2005 pour Le Télégramme (Saez, Louis Bertignac, AS Dragon...) Cette année, j'y suis retourné pour le compte de... mon blog! Alors profitez-en!
Vendredi soir: les baffles crachent les décibels, on aime. Le crachin s'invite à la fête, on aime moins. Décidément, le soleil ne passe pas ses vacances en Bretagne cette année. C'est Calibistrixe qui inaugure la grande scène, car Eiffel est en retard. Ca tombe bien: moi aussi. Quoique, à entendre leur dernière chanson, ça donne envie d'en savoir plus. Un goût de trop-peu.
Eiffel enchaîne. Je l'avais kiffé aux Eurockéennes en 2003: il avait plus d'une tour dans sa sacoche, Eiffel (désolé). Là, c'est toujours rock, mais c'est un peu ric-rac. Pas emballant, ce grand déballage de riffs. "C'était mieux avant!" Ca y est: je suis un vieux con.
C'est ensuite l'heure du smiley officiel du festival, Riké. Un goût de trop-heureux. L'ancien chanteur de Sinsemilia surfe sur la vague "tout le bonheur du monde", il ne redescend plus de son petit nuage. Peut-être est-il tombé dans une marmite de ganja quand il était petit, ce qui le ferait planer à vie. Côté textes, ce n'est pas encore du Beaudelaire. Mais il maîtrise les rimes riches:
"Combien d’hommes font des enfants, mais ne seront jamais père.
Donner la vie et prendre soin ne vont pas toujours de paire."
Non seulement il a un guitariste aux pieds nus qui aime tourner sur lui-même, mais Riké sait aussi faire des figures de style, et pas qu'avec sa gratte. Il manie bien l'antithèse dans L'addition:
"J'fais l'addition, une part d'ange, une part de démon
Le total de ma somme: L'homme, dans toute sa splendeur
Je suis, tu es, il est, nous sommes, l'homme, dans toute son horreur."
Wouahouh, so deep!
La soirée des vieilles gloires continue. Après l'ancien de Sinsé, l'ex Garçon Boucher! François Hadji-Lazaro débarque, boule à zéro et accordéon en bandoulière.
C'est ensuite un vénérable papy du reggae qui repousse le crachin avec sa voix pleine de chaleur.
Petite bio qui pourra servir de nécro dans quelques années. Horace Andy est né à Kingston en Jamaïque en 51. Selon des sources non recoupées, c'est l'année où Bob Marley, alors âgé de 6 ans, apprenait à lire et à rouler un joint. A 16 ans, Horace enregistre son premier single This is a Black Man’s Country. A 26 ans, il quitte sa Jamaïque pour le Connecticut, l'année où Jimmy Carter est élu. A 34 ans, il part vivre à Londres, l'année où Renaud sort Miss Maggie. Toujours en 1985, la dame de fer est inflexible face aux mineurs britanniques en grève. Horace Andy collabore par la suite avec Massive Attack, Joe Strummer ou encore Pierpoljak. Mais c'est à 56 ans qu'il connaîtra le summum de sa longue carrière, en jouant au Pont du rock à Malestroit.
Les organisateurs du festival ont ensuite programmé Ezra, beatboxer de talent. Pour les non-initiés, le beatboxing, c'est le fait de faire plein de bruits bizarres et onomatopées avec sa bouche. Ezra s'était distingué en 2005 en gagnant le tremplin du festival avec son groupe.
Après ces grands messieurs, Mademoiselle K apporte une touche de féminité à la soirée. Lors de la conférence de presse, mon mini-me et Visual FX (des djeuns qui foutent sur le net des vidéos d'interviews de groupes réalisées lors de festivals) s'étaient distinguées par la pertinence de leurs questions. Je m'étais en revanche pris un petit rateau. Après lui avoir parlé de sa tournée d'une semaine en Inde en juin avec Anaïs et Emilie Loizeau, je commence une question par: "Vous étiez aux Vieilles Charrues la semaine dernière..." Et là, elle me coupe: "Non." Moi: "Ah bon? En fait, je ne vous avais pas vue, mais pendant la conf de presse d'Emilie Loizeau, un journaliste avait dit que la veille, vous aviez dit..." Me sentant imperceptiblement glisser dans la confusion, je mets fin à ces élucubrations: "Je retire ma question et en tire toutes les conclusions en me retirant définitivement de la vie journalistique." Comme elle est gentille, Mademoiselle K, ça ne l'a pas vexée.
En costard-cravate, les smart guys de Bikini Machine enchaînent et se déchaînent. Mais c'est surtout la fatigue qui s'abat sur moi et me pousse à me retrancher dans mon village d'irréductibles Guérois avant l'extinction des feux. Je ne suis pas un warrior, ni même un champion, et je suis déjà plongé dans les bras de Morphée quand Champion finit cette belle soirée sur la pelouse malestroyenne.

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